Je m’appelle Fanta​ KONE, j’ai 29 ans. D’origine malienne et nigérienne, j’ai un parcours assez atypique. Je suis touche à tout et me définit comme étant une “conceptrice/créatrice”. Engagée et passionnée, je me tourne vers des projets valorisant ma culture et ma communauté ( wedding planner, organisation de speed dating, concept store etc). Bien qu’autodidacte, j’ai suivi diverses formations autour de la communication, du digital et de l’entreprenariat. Après l’obtention de mon bac en Communication et Gestion des Ressources Humaines, j’effectue un BTS en alternance au sein d’un grand groupe. Ces deux années ont suffi à me conforter sur mon choix de carrière, je quitte donc le groupe pour me lancer à mon compte. C’est à travers, ces différentes expériences que je me suis rendue compte du manque de visibilité des entrepreneurs afro-descendants. C’est ainsi que l’idée de The Latimer House est née.

Le projet a pour but de mettre en lumière les projets des afro descendants. On l’a appelé ainsi en hommage à Lewis Latimer, inventeur afro-américain qui a créé l’ampoule à filaments. Le but est donc vraiment de mettre en valeur les projets afro, de qualité et de respecter les valeurs qui se tournent autour de la sororité, la fraternité. Donc là je travaille avec une associée, notre but est de créer des événements avec un concept. Vraiment on est très axés autour de tout ce qui est conceptuel. Déjà notre marque elle tourne autour des Etats-Unis, des sororités, des universités afro américaines. Donc comme on part du principe que tout se fait avec la connaissance, la lumière etc. Nous on veut travailler avec des entrepreneurs qui sont déjà immatriculés, parce que dans notre communauté il y a énormément d’informel et du coup on veut vraiment travailler avec des personnes qui sont immatriculées, et qui ont un projet plus ou moins innovant. Nous préférons travailler avec des personnes qui ont vraiment quelque chose d’exclusif. Nous évitons donc les projets qui consistent en la revente de produits que vous connaissez sûrement déjà. On les accompagne par rapport à la direction artistique : shooting photos, campagnes qu’ils peuvent faire. Mais aussi des événements très ponctuels comme un pop-up store. Pour 2019 notre ambition est de mettre plus en avant nos partenaires à travers des événements. Cela peut être tous ceux qui vendent des cosmétiques, de l’alimentaire, de la mode etc.

 

Que pensez vous de l’entrepreneuriat dans la communauté noire, quels sont les problèmes ?

Par rapport à ça je suis très contente justement qu’il y ait cette prise de conscience de la part de la communauté qui se dit qu’il y a beaucoup de choses qui passent par l’économie, donc on met en place des actions pour que cette économie fonctionne. Néanmoins il y a encore un gros travail parce que je trouve que tout ça c’est de la sociologie. Il faut prendre en compte le fait qu’on n’a pas fait les mêmes études, qu’on a pas eu les mêmes chances que tous ceux qui tiennent des business aujourd’hui. Donc on n’a pas les mêmes codes. Mais malheureusement dans notre communauté on est encore beaucoup trop dans l’informel et on manque encore de solidarité mais y’a quand même des choses qui se mettent en place. Rien que par rapport à notre exemple, on a eu des partenariats alors qu’on vient de commencer, avec des porteurs de projets ou des marques déjà établies. On n’aurait jamais pensé qu’ils nous donneraient notre chance, donc il y a vraiment de belles choses qui arrivent mais il y a encore un gros travail ne serait ce que sur le marketing, la vision du commerce, en fait il y’a plein de codes que beaucoup d’entrepreneurs ne prennent pas en compte, ne serait ce qu’avoir une identité de marque, se positionner comme étant une vraie entreprise et pas comme quelqu’un qui vend quelque chose. Pour moi y’a ces deux-là. Les opportunistes qui se disent bon en ce moment c’est tendance de vendre du wax et qui se lancent dessus parce que c’est tendance, et d’un autre côté y’a ceux qui ont vraiment des convictions et une âme entrepreneuriale. Et qui veulent faire découvrir leur culture ou pas forcément car pour moi le marché afro et l’entrepreneuriat afro ne se limitent pas seulement à faire quelque chose autour du « noir » en fait. Moi je suis noire, et dans mon projet je veux mettre en avant ma communauté, mais demain j’ai des projets qui n’ont rien à voir avec le fait que je suis une noire en fait. Je suis juste une femme qui veut entreprendre, et je pense qu’il faut aussi qu’on enlève ça. De se dire que la communauté il n’y a pas qu’elle. Si on est un businessman ou une businesswoman, on veut vendre à tout le monde. Et notre produit doit répondre à une solution et du coup l’adapter, répondre à cette solution et vendre au plus. Je suis très contente de voir qu’il y a un bel élan de solidarité qui arrive doucement, certes très doucement mais qui arrive quand même.

 

Pourquoi ce choix de « Latimer House » ?

Ne serait ce que le nom de notre marque, il y’a une volonté. Ça s’appelle The Latimer House parce que clairement on vise la communauté noire mais quand tu entends The Latimer House, ça n’a aucune connotation noire, c’est ouvert à tout le monde. On veut vraiment qu’il y ait cette ouverture d’esprit qui veut dire voilà : venez découvrir des commerçants ou des artisans ou entrepreneurs noirs. Mais je pense que c’était une volonté de ma part. Je n’avais pas envie de mettre black ou noir dedans en fait. Mais l’histoire de The Latimer House elle a une signification. C’est Latimer qui a inventé les ampoules à filaments. Mais on ne parle que d’Edison. Si ce n’était pas Latimer les ampoules ne tiendraient même pas 10 heures. Et c’est quelqu’un qui est oublié de l’histoire et je trouve sur la scène entrepreneuriale mondiale, les noirs sont très exclus. Ce qui est pas du tout normal sachant que beaucoup de produits vendus dans le monde entier sont créés à partir de matières premières prélevées en Afrique. Comme la cola du très célèbre Coca-Cola.

 

Quelles sont les difficultés principales que vous avez pu rencontrer durant votre parcours ?

La chance que j’ai c’est que pour le moment on est deux à vraiment être impliquées à 100% dans le projet. J’ai eu de la chance, j’ai déjà eu à travailler avec d’autres personnes et le choix de l’associé est super important. Là on a la même vision, on sait comment communiquer. Du coup c’est plus facile on sait comment se calmer et comment s’y prendre. Là où on a eu des difficultés c’est lors de la communication extérieure. Quand on a eu affaire à des prestataires. Peut être qu’on était pas assez claires dans ce qu’on voulait, ou on était déjà habituées à travailler de façon autonome, ce qu’on attendait un peu des personnes avec qui on a eu à travailler. Je prends l’exemple du développeur avec qui on a dû monter le site, qui lui avait besoin de plus de directives. On n’en a pas assez fait de ce côté, ce qui fait que ça n’a pas avancé comme on l’a voulu, donc je pense que l’un des problèmes qu’on a eus c’est la communication et un petit peu de management parce qu’on apprend, il faut composer avec des caractères différents. Parce qu’on est certes très familiers les uns les autres, mais en même temps faut pas qu’on oublie qu’on est là pour travailler, donc faut mettre une limite.

 

Comment faites vous pour être bien organisée ?

Par rapport à la productivité, la chance que j’ai c’est que j‘ai fait BTS Assistante de direction, donc de base je suis quelqu’un d’organisé donc je peux prendre en compte les outils que j’ai appris pendant mon BTS (Diagramme de Gantt etc.). Par rapport à tout ce qui est planification, j’ai tout le temps un agenda avec moi. Je note tout ce qui me passe par la tête. Après le souci c’est que parfois à trop vouloir noter on a tendance à trop s’éparpiller. Ce qu’on fait c’est reprendre ces notes là pour les remettre au propre avec mon associée. De base chacune avait l’habitude de travailler seule. Donc on a dû apprendre à travailler à deux. On s’est créées un Slack dans lequel y’a le drive, dans lequel on partage les informations. On essaie de reprendre, même si on est une entreprise qui vient de démarrer, tout ce qu’on a appris dans les grands groupes et cabinets où on a pu être pour les appliquer à notre projet

 

Trois conseils que vous pouvez donner aux entrepreneurs ?

Mes 3 conseils c’est d’être super bien organisé, c’est indispensable. Sinon on sera très très vite débordé. Si on n’est pas organisé faut se faire aider.

Il faut être versatile, il faut être capable de rebondir et de ne pas perdre son sang-froid quand on a un coup de mou ou une situation imprévue. Même si y’a des moments où ça va être super dur et qu’on a envie de pleurer sous sa couverture.

Il faut aussi se connaître pour pouvoir composer avec les autres, parce que l’environnement qu’il y a autour de nous on est obligés de le prendre en compte tout le temps et faut pouvoir se recentrer sur soi.


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